Les origines de l’activité minière et métallurgique sur
les filons métallifères de la Montagne Noire remontent à l’Antiquité. Plusieurs
sites sidérurgiques présentent parfois des amas de scories considérables de
même que des restes de bâtiments et de fours ont été découverts dans les
environs de Salsigne et en particulier sur la commune des Martys.
Ces amas de scories ont été activement exploités après la
guerre de 1914, jusque dans les années quatre-vingt pour les besoins de
l’industrie détruisant ainsi une grande partie de ces sites archéologiques.
Les fouilles archéologiques récentes entreprises sur le
site des Martys par les équipes du C.N.R.S. dirigées par Claude Domergue
permettent de dater ces travaux du 1er siècle av. J.-C.
Le minerai utilisé proviendrait des gisements de type
“chapeaux de fer” abondants dans la région.
De la période médiévale on ne connaît que très peu de
choses sur l’exploitation des gisements de la région.
En 1776, De Gensanne publie un ouvrage intitulé “Histoire
Naturelle de la Province de Languedoc” dans lequel il mentionne l’existence,
au-dessus du village de Salsigne, de mines de fer, filons de cuivre mais aussi
d’un filon “arsenical”.
1. Mines de Salsigne
Le site de Salsigne est situé dans le département de
l’Aude, à une vingtaine de kilomètres au nord de Carcassonne et au pied de la
Montagne Noire. Il s’étend sur cinq communes : Salsigne, Villanière, Lastours,
Limousis et Sallèdes-Cabardès.
Sur le plan géologique, il s’agit d’un site très complexe
qui comporte des accumulations de minéraux sulfurés contenant divers métaux
(fer, cuivre, or) ainsi que de l’arsenic et du bismuth et c’est seulement en
1892 que l’or sera découvert par Marins Esparseil dans les minerais de la
région de Salsigne.
L’histoire moderne des mines du District de Salsigne est
étroitement liée à la mise en valeur des concessions de Salsigne et de
Villanière.
Le développement des exploitations de Salsigne et de
Villanière eut pour conséquence l’extension des travaux de recherche dans la
région sur environ 200 km². Ces travaux aboutirent parfois à la découverte de
filons intéressants, 7 concessions furent accordées, mais leur activité ne
connut jamais l’ampleur de Salsigne et Villanière.
1.1. Concessions de Salsigne
La concession de Salsigne, d’une superficie de 278 ha , fut accordée par
décret le 6 février 1877 pour fer et pyrite à Marins Esparseil. En 1892, il fit
analyser différents échantillons de minerai de fer qui révélèrent la présence
d’or dont la teneur dépassait parfois 200 g/tonne.
Le 24 décembre 1897, la concession de Salsigne fut étendue
à la “pyrite de fer et métaux connexes".
Au début du 20ème siècle, comme le fer n'était
plus exploité à Salsigne, M. Diederichs trouva auprès d’une société anglaise
des débouchés avantageux pour le minerai riche en arsénopyrite. L’arsenic étant
alors utilisé dans l’industrie du verre.
Bien que connaissant la teneur parfois élevée en or et
argent de l’arsénopyrite des mines de l’Aude, les fonderies anglaises ne
consentirent à payer les métaux précieux qu'à partir de 1902.
En 1908,
M . Gayet, propriétaire de la concession de Salsigne,
décida de construire à La Combe du Sault, près de Lastours, sa propre usine de
traitement de minerais à proximité de la mine.
En 1914, la guerre interrompt les travaux dans toute la
région. L'activité ne reprendre seulement en 1924 aux mines de Salsigne. Cette
même année, le 8 avril 1924, est fondée la Société des Mines et Usines de Salsigne,
par
des capitaux franco-belges, qui absorbera la Société des Mines de l’Aude
en 1940. Pendant ce temps d’autres sociétés seront fondées pour exploiter les
gisements aux environs (Malabau, Villardonnel,...) mais celles-ci n’auront
jamais une grande importance.
En 1940, elle agrandit son domaine d’exploitation par le
rachat de la majorité des parts de la Société des Mines de Villanière
récupérant ainsi les concessions de Villanière et Lastours. En 1941, la société
devient majoritaire dans le capital de la Société des Mines de Moissac,
devenant aussi propriétaire de la concession de Malabau.
A la suite de ces différents rachats et en raison de
l’arrêt des travaux sur les autres concessions, la Société des Mines et Usines de
Salsigne devint l’unique producteur d’or de la Montagne Noire,
exploitant ainsi le plus gros gisement aurifère français et l’un des plus
importants au niveau européen.
Pendant la guerre, du fait du blocage des cours de l’or
jusqu’en 1943, les mines de Salsigne, de Villanière et du Châtelet purent
maintenir une certaine activité grâce au régime des subventions leur revenant
en échange de la livraison de lingots à la Banque de France.
En février 1948, le marché de l’or fut rouvert et le
régime des subventions cessa. Les cours remontèrent de façon irrégulière permettant
à la mine de Salsigne de survivre avec des hauts et des bas.
En 1954, la baisse des cours de l’or et des effectifs en
surnombre entraînent la fermeture de la mine le 19 février 1954. Après douze
mois d’arrêt et une restructuration complète, la mine fut rouverte en janvier
1955, L’effectif initial de 1182 personnes tombait à 379 personnes. Cette
restructuration permit aussi une amélioration de l’outil de production qui
produisit 1153
kg d’or en 1956.
En 1966, la Société exploitante est rachetée par un groupe
canadien Cunningham Dunlop, via sa filiale Cheni SA., elle devient la Société
des Mines et Produits Chimiques de Salsigne (SMPCS). Les Canadiens
développent les recherches géologiques, découvrent de nouvelles réserves de
minerai et modernisent les infrastructures de la mine. Confrontée à des
difficultés financières croissantes, la SMPCS cesse ses activités en 1979.
En 1980 le BRGM, via sa filiale COFRAMINES, devient
majoritaire dans le capital de la SMPCS. Une mine à ciel ouvert est ouverte et
le nouveau puits Castan mis en service.
En
1991 la mine est fermée et la SMPCS est mise en liquidation de la société le 3
février 1992.
Conformément aux ordonnances du tribunal de commerce de
Carcassonne, trois sociétés reprennent alors les activités de SMPCS :
- Le retraitement en pyrométallurgie du minerai extrait des mines de Salsigne est confié à ECO-UNION. Spécialisée dans le traitement des déchets, cette société créé une filiale à partir de capitaux francoallemands, la Société d’exploitation de la pyrométallurgie de Salsigne (SEPS). La société SEPS a été mise en liquidation judiciaire le 19 février 1996.
- L’exploitation des « haldes », des résidus miniers contenant encore un faible pourcentage d’or, est confiée à la société en nom collectif Lastours (SNC Lastours), dont les capitaux sont français, américains et suisses. La SNC Lastours a cessé son activité en 1997.
- L’activité minière à proprement parler - deux mines d’or, l’une à ciel ouvert, l’autre souterraine, correspondant aux concessions de Salsigne et Villanière - est confiée à la société des Mines d’Or de Salsigne (MOS), filiale de groupes miniers australiens.
A partir de 1993 le groupe australien (MOS), relance
l’extraction et construit une nouvelle usine de traitement des minerais par cyanuration
qui permet lorsque la mine est en pleine activité de produire environ 2000 kg d’or par an.
En 1999, les travaux miniers souterrains totalisent près
de 100 km
de galeries d’infrastructure étagés sur une hauteur d’environ 500 m ; les chantiers productifs
se sont échelonnés de la cote +230 (5ème niveau) à la cote -114 (15ème niveau).
La production de minerai pour l’année 1999 a été de 240 000 t à
une teneur moyenne en or de 6,1 g/t. La société MOS a été admise en
redressement judiciaire en juillet 1999. Un nouveau projet d’extension de la
carrière permettant de récupérer 50 000 tonnes de minerai supplémentaires va
être élaboré, ce qui repoussera la date de fermeture en 2004 malgré des
ressources de minerai importantes estimées encore à 30 tonnes d’or, mais dont
la majeure partie n’est pas exploitable économiquement avec le cours de l’or
actuel.
Au total, depuis 1906, au terme d’une exploitation
industrielle plus que centenaire les concessions de Salsigne et la
Villanière ont produit plus de 98 tonnes d'or.
1.2. Concession de Villanière
La concession voisine de Villanière (684 ha ) fut instituée le 11
août 1898 pour mispickel au profit de la Société des Mines de l’Aude fondée
par MM. Esparseil et Diederichs.
En 1912, une fonderie est construite sur la concession
voisine de Villanière appartenant à la Société des Mines de l’Aude.
A Villanière, l’activité redémarra à partir du début de
l’année 1918, mais fut conduite au ralenti jusqu’en 1936. La production resta
très modeste, de l'ordre de 100
kg d’or par an jusqu’en 1935. La Société des Mines de l’Aude
entreprit à partir de cette date un important programme de travaux de recherche
et de développement.
En 1940, la Société des Mines de l’Aude est absorbée par
la Société des Mines et Usines de Salsigne.
1.3. Concession de Lastours
Le 18juin 1902 était instituée la concession de Lastours,
de 884 ha ,
pour exploitation de cuivre, plomb, argent et métaux connexes au profit de la Société des
Mines de l’Aude (propriétaire également de la concession de
Villanière).
C’est sur le territoire de cette concession que se situait
la mine du Roc des Cors (Fournes) où l’or fut découvert en 1892. Les minerais
de ce gîte étaient à l’époque plus riches en cuivre que ceux de Salsigne et de
Villanière avec de très bonnes teneurs en or dans les zones superficielles (20
à 50 g/t).
Cette concession ne connut qu’une très faible activité.
Elle sera toutefois retravaillée en 1947 par la Société des Mines et Usines de
Salsigne.
1.4. Concession de Malabau
La concession de Malabau, d’une
superficie de 725 ha ,
était située à l’Ouest de Salsigne. Elle fut instituée le 9 août 1913 pour
mispickel, cuivre, or et argent au profit de la Société des
Mines de Malabau.
Le minerai, moins riche en arsenic que celui des
concessions voisines, permettait un traitement par cyanuration. La société
entreprit après la guerre de 1914 des travaux miniers sur quatre niveaux et
construisit une laverie et une usine de cyanuration. En 1922, pour des raisons
techniques et financières les travaux furent arrêtés.
La Société des Mines de Malabau conclut
alors un accord avec la Compagnie Centrale de Mines et Métallurgie,
consortium appartenant au Baron Léonino et regroupant entre autres les mines
d’or du Châtelet, de La Bellière et de Chéni. Sous le contrôle de sa filiale,
la Société
des Mines de Moissac, la Compagnie Centrale de Mines et Métallurgie
perfectionna l’usine et fit reprendre les travaux en 1923.
Un cinquième niveau fut tracé, mais le gisement très
faillé était difficile à exploiter et les trop faibles réserves de minerai aboutirent
à l’arrêt des travaux miniers et de l’usine en 1927. Cette usine ne produisit
que quelques dizaines de kilogrammes d’or.
En 1939, la concession sera rachetée par la Société
des Mines de Moissac, devenue filiale de la Société des Mines et Usines de Salsigne.
1.5. Concession de Villardonnel
La concession de Villardonnel, de 386 ha , fut instituée le 4
mai 1922 pour mispickel, pyrite de fer et de cuivre et autres métaux connexes
au profit de la Société
Minière et Industrielle de Villardonnel.
Elle est située au Sud-Ouest de la concession de Salsigne.
Les travaux miniers portèrent de 1922 à 1933 sur trois
filons principaux riches en arsénopyrite et argentifère situés à Cumiès, la
Combe Lizou et la Royale. En 1932 et 1933, une tentative d’exploitation eut lieu
sur deux autres filons situés dans le ravin de Cumiès.
Cette société eut une activité réduite. L’usine de
traitement, bien que performante fut handicapée par sa situation et le manque
d’eau tandis qu’à la mine les travaux de recherche et de préparation s’avérèrent
insuffisants pour assurer la production de minerai nécessaire au bon
fonctionnement de l’usine.
De 1922 à 1931, une centaine de kilogrammes d’or furent
produits par la Société Minière et Industrielle de Villardonnel. La concession
sera par la suite rachetée par la Société des Mines et Usines de Salsigne.
1.6. Concession de Pujol
La concession de Pujol, de 934 ha , fut instituée le 23
mai 1922 pour pyrite de fer et de cuivre et métaux connexes au profit de la Société des
Mines de Pujol.
Elle est située à l’Ouest des concessions de Villardonnel
et Malabau. Trois filons de chalcopyrite non aurifère furent exploités entre
1923 et 1934 produisant une centaine de tonnes de cuivre.
1.7. Concession de La Caunette
La concession de La Caunette , de 87 ha , fut instituée le 10
février 1879 pour plomb argentifère au profit de la Société des
Mines d’Argent de La Caunette.
Le filon composé principalement de galène, de cuivre gris
argentifère et de sphalérite fut sans doute exploité dans l’antiquité puis au
Moyen-Age. La teneur moyenne du minerai était de l’ordre de 3,6 % d’argent à la
tonne, mais très pauvre en or.
Après la seconde guerre mondiale, une tentative de reprise
des travaux se solda par un échec en raison de trop fortes venues d’eau.
La production globale de cette mine aura été d’environ
7 000 tonnes de plomb, 84 tonnes d’argent, 14 000 tonnes de zinc
et 200 000 tonnes de minerai de fer.
1.8. Permis d’exploitation de Cabrespine
Accordé le 2 mai 1939 et renouvelé le 24 novembre 1942, ce
permis, de 640 ha ,
fut accordé à la Société Minière de
Cabrespine pour exploitation de fer, cuivre, argent, or et métaux connexes.
Il est situé à l’Est des concessions de Lastours et
Villanière. Des travaux de recherche furent entrepris vers 1930 sur un gisement
constitué par un “chapeau de fer” riche en or. Par la suite, des filons de
pyrite et d’arsénopyrite aurifère et argentifère y furent découverts. Une
trentaine de kilogrammes d’or a été extraite de ce gisement.
2. Travaux récents sur le pourtour de la Montagne Noire
Dans les années 1985-1990 le flanc sud de la Montagne Noire qui
renferment les minéralisations de Salsigne fit l'objet de prospections
importantes de la part de la Société des
Mines et Produits Chimiques de Salsigne puis de la société Mines
d’Or de Salsigne (MOS), ainsi que de la Cogéma. Cette
frénésie de recherches se continua quelques années plus tard sur le flanc nord
de la Montagne Noire
(Partie est des Monts de Lacaune) à la limite des départements du Tarn et de
l'Aveyron. Bien que, d'après des cartes postales anciennes, une mine d'or ait
existé sur le secteur de Sylvanès, aucune de ces recherches n'aboutit à la
découverte d'un gisement.
3. Les Cévennes
L’or dans cette région est particulièrement abondant dans
les rivières ce qui déclencha au début du siècle, toute une série de campagnes
de recherche en particulier dans le secteur de Bessèges - Gagnière et celui de
Chamborigaud - Pont de Rastel.
Dans le secteur de Bessèges et de la Gagnière, l’or se
trouve sous forme détritique dans le conglomérat situé à la base des formations
du houiller et sous forme alluvionnaire dans les cours d'eau qui recoupent ces
poudingues stéphaniens. Des travaux importants furent entrepris au début du
siècle par la société du Bulidor, le long de la rivière la Gagnière. Ces
travaux de recherche se soldèrent par un échec malgré un grand nombre de
galeries dont certaines sont toujours visibles. Dans certains niveaux, le
conglomérat aurait des teneurs de 6 à 10 g d’or à la tonne.
Des travaux de recherches ont été effectués sur ces
secteurs par la Société d'Etudes, de Recherches et de prospections Minières La
Gagnières.
La Société de Mines d'or de la Gagnière
qui semble tirer son origine de ce secteur, ne fit plus parler d'elle après le
refus de l'administration de lui accorder la concession des mines d'antimoine
de Malbosc dans l'Ardèche.
En 1986, une demande de permis de recherche d'Abeau (pour
or, argent, tungstène et antimoine) a été déposée sur la région ; elle couvre les communes de Béssèges,
Bordezac, Brahic et Aujac.
Dans le secteur de Chamborigaud - Pont de Rastel et
Alteyrac, les indices d’or se présentent sous forme de filon de quartz
minéralisé en mispickel et stibine. Plusieurs travaux de recherche furent
entrepris à partir de 1906 mais n’aboutirent à aucune concession malgré des teneurs
parfois intéressantes de 50 g
d’or à la tonne.
En 1983, les travaux de prospection réalisés par la Société
des Mines et Produits Chimiques de Salsigne sur ce secteur, à la limite
des départements du Gard et de la Lozère, ont débouché sur l'octroi du permis
de recherche d'Alteyrac pour or, argent, arsenic et antimoine.
En 1987, des recherches sont effectuées par Cogéma
et le BRGM sur le secteur de Génolhac. Elles aboutiront à
l'attribution du permis de recherches de Concoules au BRGM en 1990.
Les travaux qui ont été réalisés sur ces différents permis
de recherches se sont heurtés à une certaine hostilité de la part de certains
habitants de la région qui préfèrent largement l’industrie touristique à
l’industrie minière. Aucun gisement exploitable n'a été mis en évidence sur ces
secteurs.
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